Lenz de georg büchner
UNE PRODUCTION D’AIX-MARSEILLE UNIVERSITÉ / THÉÂTRE ANTOINE VITEZ AIX-EN-PROVENCE. UNE COLLABORATION ENTRE FRANCK DIMECH ET ARNO CALLEJA AVEC LES ÉTUDIANTS THÉÂTRE D’AIX-MARSEILLE UNIVERSITÉ.
Vous n’entendez donc pas, vous n’entendez donc pas la voix épouvantable qui crie partout à l’horizon et qu’on appelle ordinairement le silence ?
Lenz de Büchner est tiré d’un fait réel : la marche du jeune poète Jakob Lenz qui, après une tentative de suicide et des jours d’errance, arrive dans le village vosgien de Waldersbach, la nuit du 20 janvier 1778, auprès du pasteur Oberlin.
Paysages extérieurs (montagnes et crêtes enneigées) autant qu’intérieurs (fuites incessantes, confusion, délires), traversées de toutes les nuances de gris. Rien d’immaculé dans ces contrées, mais des masses menaçantes, envahissantes, des trouées que tente de combler la bille noire de la mélancolie.
Musique atonale pour cœur arythmique : la langue de Büchner est cette musique, et le cœur arraché, irrégulier, c’est celui de Lenz, qui s’affole, se perd et s’effondre.
En Lenz tout se heurte, rien n’est stable, tout s’ouvre et se déverse : perméabilité angoissante de l’extérieur et de l’intérieur, du réel et du fantasme, de la mémoire et du présent. Le sens s’est lové comme un serpent blessé dans un bocal de mercurochrome. La bête ne meurt pas, elle tourne sur elle-même en un perpétuel mouvement d’anéantissement. C’est que dans sa fuite, et comme sans le vouloir, Lenz créé une démarche (comme on dit « une déconne »), un étrange rite qui consiste à marcher tout en s’effondrant. Marche qui ne dure pas, ne va nulle part, mais répond au non-sens du monde par un excès d’énergie, de pensées folles, un supplément irrécupérable de compassion et d’amour.